Bail dérogatoire : un outil souple mais exigeant pour les locaux commerciaux

Dans un contexte économique et politique incertain, le bail dérogatoire attire de plus en plus les bailleurs et les professionnels. Ce contrat, souvent appelé à tort bail précaire, permet de louer un local commercial sans s’engager sur neuf ans. Mais derrière cette souplesse apparente se cache un régime juridique strict. En comprendre les règles, c’est éviter qu’une solution temporaire ne devienne un problème durable.

1. Un cadre légal précis pour un usage temporaire

Le bail dérogatoire, selon l’article L.145-5 du Code de commerce, offre aux parties une alternative souple au bail commercial classique.
Ainsi, il permet au bailleur et au locataire de déroger au statut des baux commerciaux. Cela à condition que la durée totale n’excède pas trois ans.

Autrement dit, il est possible de conclure un ou plusieurs baux successifs. Toutefois, la durée cumulée ne peut jamais dépasser trois ans. Au-delà, le contrat est automatiquement requalifié en bail commercial. Même si les parties affirment le contraire.

Pour être valable, le bail dérogatoire doit être :

  • conclu par écrit avant l’entrée en jouissance ;
  • exprimer clairement la volonté de ne pas appliquer le statut des baux commerciaux ;
  • prévoir une durée déterminée, souvent inférieure à trois ans ;
  • et faire l’objet d’un état des lieux contradictoire.

Ce cadre juridique précis évite les dérives mais impose une vigilance constante.

2. Une liberté attractive mais encadrée

La force du bail dérogatoire réside dans sa flexibilité.


Pour le bailleur, il permet de tester un locataire sans s’engager à long terme, ni verser d’indemnité d’éviction à la fin du bail. Il offre également la possibilité de réadapter son patrimoine en fonction de la conjoncture économique.

Pour le locataire, l’intérêt est tout aussi fort. Il peut évaluer un emplacement, tester un concept ou mesurer la fréquentation d’un quartier sans se lier neuf ans. La durée peut être très courte — six mois, un an, dix-huit mois — selon les besoins.

Cependant, cette liberté contractuelle a ses limites. Le locataire ne bénéficie d’aucun droit au renouvellement ni d’indemnité d’éviction. Autrement dit, à la fin du bail, il doit quitter les lieux, même si son activité fonctionne bien. Cette précarité est la contrepartie de la souplesse offerte.

3. Une vigilance indispensable pour éviter la requalification

La prudence reste essentielle, car les risques juridiques sont réels.


Si le locataire reste dans les lieux après la fin du bail et que le bailleur ne s’y oppose pas dans le mois, un bail commercial naît automatiquement. Ce nouveau bail dure alors neuf ans. De plus, le bailleur devra respecter le régime complet du bail commercial : droit au renouvellement, indemnité d’éviction, congé triennal, etc.

De même, la succession de plusieurs baux dérogatoires dépassant trois ans est interdite. La requalification en bail commercial est alors inévitable, même si la volonté des parties est contraire.

En pratique, il est donc essentiel de :

  • fixer des durées claires et non renouvelables ;
  • prévoir une opposition expresse à la fin du bail si le locataire reste en place ;
  • formaliser chaque étape par écrit.

La souplesse du bail dérogatoire est une arme à double tranchant. Mal maîtrisée, elle peut engager le bailleur sur neuf ans sans qu’il l’ait voulu.

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